Qu’y a-t-il de commun entre le siège de la Fédération française du bâtiment à Compiègne (Oise), un magasin bio à Saint-Hilaire-de-Riez (Vendée), une salle de spectacle à Mazan (Vaucluse), un centre de secours et d’incendie à Colombey-lès-Belles (Moselle) ? Ils ont été construits en bottes de paille, comme 500 nouveaux bâtiments chaque année en France.
PAR CHRISTEL LECA - AVRIL 2021
Si la majorité des 5 000 bâtiments en paille construits sur notre territoire sont des maisons individuelles, de plus en plus de maîtres d’ouvrage publics font appel à ce matériau depuis la mise en application des “Règles professionnelles de construction en paille” par la Commission prévention produits au sein de l’Agence qualité construction en 2012. Car elle permet d’obtenir de l’assureur la garantie décennale du chantier. « La typologie des bâtiments construits en paille est donc en train d’évoluer », explique Benoît Rougelot, architecte et coprésident du Réseau français de la construction paille (RFCP).
Un important pouvoir isolant
L’architecte construit depuis quinze ans en bottes de paille, appréciant particulièrement leur qualité d’isolation. Avec une conductivité thermique (ou lambda) de 0,052 W/(m.K) et une épaisseur de 37 cm, elles offrent une résistance thermique (coefficient R, le “pouvoir isolant”) de 7.1 m2.K/W, supérieure à certains isolants synthétiques (polystyrène, polyuréthane), à des laines minérales (roche, verre), mais aussi à certains isolants biosourcés. « Mais l’impact carbone est aussi important. La paille est un sous-produit agricole très peu valorisé dont on produit 26 millions de tonnes chaque année en France. 5 % suffiraient à isoler 500 000 logements par an ! Dans un pays agricole comme le nôtre, la construction paille est particulièrement dynamique. »
Une ressource locale et économique
Elle brûle ? Pas quand elle est compressée en bottes. Elle se détériore ? La maison “Feuillette”, construite en ossature bois et isolation paille en 1920 à Montargis (Loiret), tient toujours debout. Ressource locale (90 % des approvisionnements viennent de moins de 50 km autour des sites de construction ou fabrication), la botte de paille est directement utilisable en construction après sa fabrication dans un champ de blé : « C’est l’isolant ayant nécessité la plus faible énergie grise », ajoute Benoît Rougelot.
Il vient d’achever l’isolation thermique par l’extérieur (ITE) en bottes de paille d’un pignon d’immeuble de sept étages pour Paris Habitat (XVe arrondissement), « pour un coût comparable à celui d’une ITE de qualité en laine minérale », précise le bailleur social. Le chantier a permis de former de jeunes architectes et artisans à la pose du matériau, mais aussi d’offrir un emploi à plusieurs jeunes en insertion.
Sortir de l’âge du feu
Créée en 2006, le RFCP revendique 425 adhérents : artisans, architectes, maîtres d’ouvrage, autoconstructeurs, organismes de formation, collectivités, etc. À l’occasion de la nouvelle réglementation environnementale (RE2020), il attire « l’attention des pouvoirs publics (État et collectivités territoriales) et des acteurs de terrain sur les risques inhérents à une utilisation massive de la biomasse en tant que source d’énergie. Ceci pourrait faire exploser les prix des coproduits agricoles et forestiers et déstabiliser les filières existantes. Sortir de l’âge du feu ne consiste pas à se contenter de remplacer les ressources fossiles par des renouvelables, mais exige de donner la priorité à la sobriété énergétique. »
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