Entretien

50 milliards sur dix ans pour rénover les écoles

L’Alliance écologique et sociale, qui réunit associations et syndicats, publie un rapport pour alerter sur l’état des établissements scolaires en France et appelle à des rénovations rapides, pour ne pas que les inégalités entre élèves se creusent. Entretien avec Robin Ehl, chargé de campagne et plaidoyer Oxfam France pour l’adaptation au changement climatique.

PAR CLAIRE BAUDIFFIER - OCTOBRE 2025
Robin Ehl, chargé de campagne et plaidoyer Oxfam France pour l’adaptation au changement climatique. ©DR

L’Alliance écologique et sociale, composée de syndicats et associations (CGT Educ’Action, Greenpeace, Oxfam France…), publie un rapport sur l’urgence de rénover le bâti scolaire. Quelle est sa genèse ?

Robin Ehl : Fin juin-début juillet, 2 200 écoles ont dû fermer, car il faisait trop chaud dans leurs murs. Tous les ans, lors des canicules, on entend parler de cela quelques jours, puis l’attention médiatique et politique retombe. Nous avons donc voulu alerter plus largement, pas seulement lorsqu’il fait chaud, sur la nécessité de rénover le bâti scolaire, qui est dans un état de vétusté important.

Quel est cet état de vétusté ?

R. E. : Le problème est que le ministère de l’Éducation nationale n’a jamais fait de bilan précis, mais il estimait en 2022, en extrapolant des données de quelques écoles, que 10 % des établissements scolaires se trouvaient en état de vétusté (fenêtres qui ne ferment pas, fissures, chauffage qui fonctionne mal…). Vu les premiers résultats d’une enquête menée en parallèle du rapport par les syndicats de l’éducation*, ce chiffre grimperait plutôt à 20, voire 30 %.

Y a-t-il des actions simples et rapides à mettre en œuvre ?

R. E. : Dans 43 % des établissements, il n’y a pas de volets sur les façades sud, alors qu’on sait que cela fait automatiquement baisser la température de 3 à 4 °C. En installer ne paraît pas insurmontable. D’autres dispositifs simples, comme repeindre les toitures en blanc, sont intéressants. À Paris, les températures ont baissé de 6 °C à l’école Louis-Blanc simplement parce que la municipalité a repeint le toit dans une autre couleur.

Que propose l’Alliance écologique et sociale ?

R. E. : Nous proposons dans le rapport de mettre en œuvre un observatoire du bâti scolaire, avec notamment des protocoles pour la continuité de l’enseignement. Il y aura de plus en plus d’épisodes de fortes pluies/grêles ou caniculaires à l’avenir, ou potentiellement les écoles devront fermer. Il faut donc savoir comme réagir dans ces cas-là. En Espagne, par exemple, il existe un congé climatique pour les parents.

Vous expliquez aussi dans ce rapport qu’un retard de rénovation entraîne des conditions d’enseignement dégradées, mais aussi un creusement des inégalités.

R. E. : À chaque fois que l’école ferme, les inégalités se creusent. En temps de canicule, certains élèves rentrent chez eux dans une maison avec jardin, voire piscine, quand d’autres retournent dans leur appartement mal isolé, où il fait parfois encore plus chaud qu’à l’école. La vétusté en général affecte aussi la santé des personnels et des enfants. Par ailleurs, la productivité au travail baisse dès que les températures sont supérieures à 20 °C. À partir de 20 °C, on perd 2 à 3 % de productivité par degré supplémentaire.

Combien coûterait une rénovation totale du parc scolaire ?

R. E. : Dans un rapport de 2020 remis au gouvernement, il était indiqué qu’il faudrait 4 milliards d’euros par an. En tenant compte de l’inflation des coûts de matériaux, notamment, nous estimons dans le rapport qu’il est nécessaire de partir sur un investissement a minima de 50 milliards d’euros sur dix ans. Pour cela, les communes, qui ont vu leurs dotations fondre et leurs capacités à s’endetter baisser, ne vont pas pouvoir y aller seules. Elles doivent être aidées par l’État. Sinon, on sait ce qu’il se passe, les communes les plus aisées rénovent, mais pas (ou moins) les autres, ce qui creuse davantage les inégalités.

* 61 % des enseignants interrogés indiquent notamment qu’il fait froid dans leur salle de classe, souvent faute d’un chauffage suffisant.

En chiffres
  • Seuls 14 % des établissements scolaires répondent aux normes « bâtiments basse consommation ».
  • Le bâti scolaire constitue 30 % du patrimoine public avec 63 000 bâtiments pour 157 millions de m².
  • Les bâtiments scolaires représentent environ 12 % de la consommation d’énergie du secteur public en France.

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