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Comment concilier justice sociale et transition énergétique ?

Si la transition énergétique est souvent abordée sous un prisme « technique », on sait désormais qu’elle ne pourra avoir lieu sans justice sociale, et inversement. Les collectivités peuvent agir, notamment via le programme Slime. Explications avec Marie Moisan, responsable de projets précarité énergétique et coordinatrice du programme Slime au Cler-Réseau pour la transition énergétique.

PAR CLAIRE BAUDIFFIER - SEPTEMBRE 2023
Marie Moisan, responsable de projets précarité énergétique et coordinatrice du programme Slime au Cler-Réseau pour la transition énergétique. ©Pierre Duffour – Andia

Depuis quand associe-t-on justice sociale et transition énergétique ou neutralité carbone ?

On date cela du mouvement des Gilets jaunes en 2018, où l’on a vu apparaître le slogan « Fin du monde, fin du mois : même combat ». En France comme à l’échelle mondiale, ce sont les plus démunis qui sont et seront les plus touchés par les changements climatiques, et qui auront le plus de mal à s’adapter. À l’inverse, les plus aisés, qui ont une empreinte carbone plus importante, trouveront des solutions pour s’adapter. Les politiques publiques doivent prioritairement intégrer ces enjeux au risque que les inégalités se creusent. On peut prendre l’analogie d’un immeuble, dans lequel les appartements mal isolés sont sources de dépenses énergétiques importantes, avec des inégalités de consommation en fonction du positionnement des appartements dans le bâtiment. Si on isole, on réduit les consommations, et donc les factures pour tous, mais aussi les inégalités entre voisins, entre les précaires et les plus aisés.

Comment les injonctions à la sobriété énergétique ont-elles résonné auprès des personnes en précarité énergétique cet hiver ?

Les collectivités, qui mettent en œuvre le programme Slime, nous ont fait remonter que des ménages déjà en restriction d’énergie se sont encore plus privés. Contrairement à ce qui était attendu, les demandes d’aides au Fonds de solidarité pour le logement ont baissé. C’est très dangereux, car ce sont des personnes qui deviennent invisibles pour les territoires, qui n’ont plus la possibilité de les identifier, et donc de les accompagner…

Comment les collectivités peuvent-elles œuvrer ?

Le Slime est une solution pour agir contre la précarité énergétique. C’est un programme, une méthodologie d’intervention, qui vise à massifier le repérage, l’orientation et l’accompagnement des ménages en situation de précarité énergétique que nous coordonnons au Cler-Réseau pour la transition énergétique. Il permet aussi globalement de lutter contre le non-recours aux aides. Depuis 2013, les collectivités peuvent ainsi mettre en place des dispositifs – adaptés aux spécificités de leur territoire – qui sont éligibles aux CEE.

L’idée est d’abord de repérer les publics concernés, en coordonnant toute la chaîne d’acteurs qui peuvent être impliqués sur ces sujets, puis de réaliser un diagnostic sociotechnique – pas un audit énergétique ! – pour comprendre les usages des ménages, et enfin de les orienter au mieux vers des solutions adaptées. Ce peut être des travaux de rénovation énergétique, une médiation avec le fournisseur d’énergie en cas de souci sur les factures ou avec le bailleur pour les locataires, des conseillers en économie sociale et familiale en cas de problématiques de gestion de budget… Les ménages seront suivis jusqu’à mise en œuvre des actions.

Quel est le bilan du Slime ?

En 2023, 46 collectivités pilotent un Slime sur leur territoire, sachant que le programme se déploie sur trois ou quatre ans. En moyenne depuis dix ans, 11 000 ménages ont été visités chaque année. Parmi eux, 46 % se sont lancés ensuite dans des travaux, mais l’objectif principal des visites est de redonner de la compréhension, et donc du pouvoir d’agir aux bénéficiaires. Les collectivités impliquées nous remontent souvent que le fait de se rendre chez les personnes et de répondre dans un premier temps directement à leurs attentes (fournir des plaids et vêtements chauds, par exemple, était cet hiver une demande assez nouvelle…) permet d’instaurer un climat de confiance, et donc de restaurer un lien avec des personnes qui avaient pu développer de la méfiance envers le service public en général.

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