Décryptage
Humain et technologie, l’indispensable duo
Le projet Solenn, qui visait à expérimenter un smart grid dans l’agglomération de Lorient, vient de s’achever. Les conclusions convergent sur un point : pour réussir la transition énergétique, il faut allier accompagnement humain et technologies numériques.
Comment maîtriser la demande en électricité et sécuriser l’alimentation électrique ? Voilà les deux grandes questions auxquelles a voulu répondre le projet Solenn (Solidarité énergie innovation), qui vient de se conclure après quatre ans d’expérimentation. Lancé en 2015, en réponse à un AMI (appel à manifestation d’intérêt) de l’Ademe, il a rassemblé 12 partenaires et 900 foyers volontaires de l’agglomération de Lorient, chez qui un compteur Linky a été installé. Certains ont bénéficié d’un accès à un site Internet pour le suivi de leurs consommations ; d’autres, d’équipements de domotique pour suivre au plus près et en temps réel leurs différents postes de consommation. D’autres encore ont pu profiter d’un suivi collectif (à travers des ateliers) ou particulier (passage à domicile). Une méthodologie qui a permis de tirer de nombreux enseignements.
Distribuer moins d’énergie mais à un plus grand nombre
D’abord, d’un point de vue technique, la méthode a permis à Enedis, qui était en charge de l’infrastructure technique et de la collecte des données, de tester l’écrêtement ciblé. « Celui-ci correspond en fait à une limitation solidaire de puissance », détaille Claudie Guyomard, chef du projet Solenn. « Lors d’un épisode exceptionnel qui met en difficulté le réseau, au lieu d’avoir recours au délestage, et donc de couper l’électricité sur une partie du réseau, il s’agit de distribuer moins d’énergie, mais à un plus grand nombre. » « Grâce à Solenn, nous sommes à présent capables techniquement de mettre en place cette solution », ajoute Jean-Philippe Lamarcade, directeur régional d’Enedis Bretagne.
Le gestionnaire de réseau a également avancé sur la délicate question des données personnelles des utilisateurs : il a mis au point un outil simple à travers lequel l’usager peut facilement gérer son consentement concernant l’utilisation de ses données. L’industrialisation de l’outil est envisagée pour fin 2019.
L’indispensable accompagnement humain
Le projet a par ailleurs accordé une grande place à l’usager. « Le plus de Solenn, c’est d’avoir remis l’humain au cœur de cette recherche », précise Marie-Laure Lamy, présidente de l’Aloen (l’agence locale de l’énergie). « Et les résultats nous montrent que l’accompagnement humain est indispensable pour transformer les données récoltées par les outils technologiques en informations, puis en connaissances et donc en éco-gestes. » Les études menées en parallèle par l’université de Bretagne-Sud (UBS) révèlent que ce sont principalement les bénéfices individuels orientés sur le foyer ainsi que le bien-être psychologique et moral lié aux actions de maîtrise de l’énergie qui sont les principaux moteurs des éco-gestes, devant l’envie de « sauver la planète ». « Or pour déclencher ces bénéfices, il faut faire tester les pratiques, et donc trouver la synergie entre accompagnement humain et technologique », conclut Morgane Innocent, chercheuse en comportement du consommateur à l’UBS.
Au final, les foyers expérimentateurs ont économisé entre 2 et 7 % sur leur facture d’électricité. « Mais plus que le niveau d’économie, c’est leur implication dans la transition énergétique qui fait de Solenn un succès », souligne Jean-Philippe Lamarcade.