Stratégie
La méthanisation pour réduire les déchets résiduels
En changeant de technique de valorisation des déchets, le syndicat des déchets ménagers du Tarn, Trifyl, va réduire de 80 % les déchets traités par enfouissement et générer des recettes.
Trifyl veut aller plus loin que la loi de transition énergétique du 17 août 2015. Dans son article 70, celle-ci fixe comme objectif de « réduire de 30 % les quantités de déchets non dangereux non inertes admis en installation de stockage en 2020 par rapport à 2010, et de 50 % en 2025 ». Le syndicat, qui fédère quatorze collectivités chargées de la collecte des déchets dans le Tarn, une partie de la Haute-Garonne et de l’Hérault, entend les diminuer de 80 %. Pour y parvenir, Trifyl travaille depuis 2014 sur un projet d’usine de méthanisation avec injection du gaz produit dans le réseau de transport de gaz. Prévue pour 2022, celle-ci viendra remplacer l’actuel système de traitement des déchets par enfouissement (bioréacteur) assorti d’une cogénération.
« Aujourd’hui, 100 % des déchets résiduels, ceux issus de la poubelle grise, partent en enfouissement. Demain, il en restera seulement 20 %, correspondant aux intrants refusés par l’usine », explique Camille Demazure, chef de projet industriel chez Trifyl.
Les motivations du syndicat sont à la fois économiques et sociales. À chaque tonne enfouie en décharge, Trifyl paie la TGAP (taxe générale sur les activités polluantes). Celle-ci va passer de 15 € la tonne à 65 € en 2025. « Aujourd’hui, avec une TGAP basse, la tonne de déchets d’ordure ménagère traitée revient à 60-70 €. Après 2025, elle dépassera 130 €. Notre objectif avec la nouvelle usine est un coût cible de 100 € la tonne, amortissement et coûts d’exploitation inclus, et recettes déduites », indique Camille Demazure.
Diminuer les coûts pour les contribuables
« Si on ne fait rien aujourd’hui, les contribuables vont payer très cher le traitement du déchet. Les recettes de vente de gaz permettront de diminuer le coût du traitement pour les contribuables », souligne Carole Barrau, chef de service Recherche et Développement chez Trifyl. Le 25 octobre 2018, le syndicat mixte a signé un contrat avec Teréga, l’un des deux gestionnaires du réseau de transport de gaz. Le biogaz produit en digesteur par méthanisation sera épuré puis entièrement injecté dans le réseau de gaz. « Nous allons pouvoir injecter jusqu’à 600 m³ par heure de biométhane, soit l’équivalent de 10 % de la consommation en gaz des foyers tarnais », précise Carole Barrau. Chaque mégawattheure de biométhane injecté pourra donner lieu à l’émission d’une garantie d’origine (dans un registre géré par GRDF). Trifyl entend trouver un fournisseur prêt à payer plus que le tarif d’achat de référence pour valoriser l’origine verte du gaz qu’il va produire.
L’usine sera construite sur le pôle des énergies renouvelables du site de Labessière-Candeil, où se trouvent le siège social de Trifyl et le bioréacteur actuel. Une surface de 5 hectares lui est réservée. Le syndicat a lancé un marché public global de performances et retenu quatre groupements d’entreprises. Ceux-ci, actuellement en phase de dialogue compétitif, déposeront leur offre finale en mars 2019. Trifyl choisira alors le groupement qui aura pour mission de concevoir, construire et exploiter l’usine de méthanisation pendant cinq ans.
Budget
- Date de mise en service : 2022.
- Lieu : Labessière-Candeil (Tarn).
- Débit d’injection : jusqu’à 600 m³/h.
- Budget : 60 M€ d’investissements.
- Financement : Trifyl (via les collectivités adhérentes), emprunts bancaires. Subventions espérées de l’Ademe, de la région, du département.
Le bioréacteur actuel
Depuis 2007, Trifyl enfouit les déchets résiduels dans un bioréacteur qui transforme la matière organique en biogaz. Celui-ci est dirigé en majorité vers une installation de cogénération qui produit de l’électricité et de la chaleur. Une petite partie du biogaz sert à faire rouler une quinzaine de véhicules de Trifyl au biométhane-carburant. Et une part alimente un projet R&D de fabrication de biohydrogène à partir de biogaz.