Portrait

Le vent le porte déjà

Ingénieur et militant de longue date de la transition énergétique, Jean-Yves Grandidier a su garder son indépendance après avoir fondé Valorem en 1994, aujourd’hui pilier du développement éolien et solaire en France. C’est un entrepreneur engagé concrètement dans l’appropriation des énergies renouvelables par les acteurs des territoires ruraux.

PAR FRANCK TURLAN - MAI 2019
Jean-Yves Grandidier, président du groupe Valorem ©Valorem

Un pionnier toujours bien vert, debout, et chargé d’une énergie communicative… Jean-Yves Grandidier est le président du groupe Valorem, entreprise qu’il a fondée en 1994 à Bègles et qui compte aujourd’hui  240 salariés. Avec Jean-Michel Germa, Jean-Marc Armitano et quelques autres pionniers, il fait partie de ces ingénieurs passionnés d’éolien, devenus chefs d’entreprise pour mieux faire décoller la filière : unis au sein de France énergie éolienne (FEE), ils ont ainsi obtenu de l’État le principe du tarif d’obligation d’achat, en 2001. Aujourd’hui, Jean-Yves Grandidier reste le seul de ces pionniers à la tête de son entreprise, dans une activité mangeuse de capitaux, où les “majors” de l’énergie ont souvent rattrapé leur retard en “colonisant” les jeunes pousses.

Pour lui, la transition énergétique passe forcément par une vision territoriale. C’est d’abord physique, électrique : pouvoir raccorder les nouvelles unités de production d’énergie renouvelable sur le réseau de distribution d’électricité. C’est aussi une question de vision concertée de l’aménagement. « En 2005, j’étais favorable à l’instauration par l’État des zones de développement éolien (ZDE). On avait le bon exemple du Finistère : laisser le temps du politique permet de vraies discussions sur le territoire, pour savoir où et comment placer les installations. Au final, les projets peuvent se faire plus facilement, car ils sont mieux acceptés ». Mais le rêve de vision partagée tourne court : les ZDE sont systématiquement attaquées par les anti-éoliens, rajoutant des délais de développement qui mettent en péril les entreprises du secteur, surtout les “petites”. Jean-Yves Grandidier fait partie de ceux qui demandent leur abrogation, obtenue en 2013.

Le pionnier du financement participatif

Alors comment développer en France des projets d’infrastructures EnR de qualité ? Jean-Yves Grandidier reconnaît ne pas avoir de recette. Mais il a identifié depuis longtemps un ingrédient intéressant : la participation réelle des acteurs d’un territoire.

Valorem a été le premier développeur français à intégrer en 2010 du financement participatif, d’abord sous forme d’obligations, dans un parc éolien limitrophe du Tarn et de l’Aude. Désormais, quasiment tous les projets de l’entreprise sont menés ainsi, Valorem ayant participé à un programme européen sur « le potentiel du financement participatif comme outil contribuant à accélérer la croissance des énergies renouvelables en Europe ». L’entreprise va plus loin en faisant du co-développement : soit en répondant à des appels à candidatures de territoires, comme à Narbonne, où une centrale solaire au sol de 12 MW doit être réalisée suite à l’initiative d’un agriculteur ; soit en ouvrant à l’investissement local des projets de l’entreprise, comme dans le Lot, où une centrale éolienne de 14 MW a bénéficié de l’investissement d’une coopérative agricole, les Fermes de Figeac, à hauteur de 35 %. Ici, la coopérative a joué un rôle de levier supplémentaire dans l’investissement local, en collectant en outre les fonds de 180 habitants, pour un montant de 1,4 million d’euros. « Dans ce projet, Valorem garantit la rentabilité : les gens qui investissent ne sont pas forcément des sachants de l’énergie et il ne faut surtout pas faire de contre-référence si on veut garder la confiance du public », souligne Jean-Yves Grandidier.

La participation des acteurs des territoires se traduit aussi par l’insertion via l’activité économique sur les chantiers du groupe. En 2016, Valorem devient le premier opérateur indépendant à inclure des clauses d’insertion sur les parcs en construction, pour renforcer le pilier social du développement durable. Ces métiers d’avenir deviennent ainsi accessibles à des personnes éloignées du monde de l’emploi, dans des communes rurales touchées par la désertification. 

Un levier dans la lutte contre la précarité énergétique

Le patron de Valorem souhaite améliorer encore son empreinte territoriale en fléchant une partie des bénéfices d’une centrale EnR dans des travaux de rénovation énergétique, à l’échelle locale. Avec une approche particulière en faveur des actions de lutte contre la précarité énergétique : « Si on ne veut pas vivre une seconde vague de Gilets jaunes, on se doit d’aider les gens à être résilients, dans une société qui va connaître quoi qu’on fasse une hausse des prix du carbone et de l’énergie », estime Jean-Yves Grandidier. L’entreprise a lancé, via son fonds de dotation Watt for Change, un appel à projets au niveau français, aujourd’hui clôturé, qui devrait lui permettre de soutenir une quinzaine d’actions concrètes et de mieux cibler à l’avenir son aide sur un chantier social colossal.

Parallèlement à ces actions de terrain, le patron de Valorem compte bien poursuivre son plaidoyer en faveur des renouvelables, que ce soit auprès des parlementaires ou du grand public, comme avec son livre Le vent nous portera. Il y apporte la démonstration que la transition énergétique, c’est maintenant qu’elle peut s’opérer, avec l’éolien et le photovoltaïque… « Avec ces deux productions complémentaires, on peut parvenir rapidement à 80 % de notre mix électrique. Ne serait-ce qu’en ressources fiscales pour les collectivités, ce sera au moins cinq fois plus que le nucléaire aujourd’hui, qui verse à une centaine d’intercommunalités. Nous, on va en toucher un millier, avec des installations mieux réparties. Ce sont les territoires ruraux qui sont le plus concernés, là où on a besoin de moyens pour maintenir les services publics ». Pas de doute, si Jean-Yves Grandidier parvient à partager sa dynamique, le vent nous portera.

 

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