Stratégie
Territoires zéro exclusion énergétique : quel accompagnement ?
Ce dispositif, porté par l’association Stop exclusion énergétique, a sélectionné quatorze territoires démonstrateurs pour mettre en place une démarche poussée d’accompagnement des ménages, grâce au déploiement d’un nouveau métier : l’ensemblier solidaire.
Changer d’échelle… Tel est l’objectif du programme Territoires zéro exclusion énergétique, qui vise à mettre en place une méthodologie d’accompagnement des ménages les plus précaires dans la démarche de rénovation thermique de leur logement. Il est porté par l’association Stop à l’exclusion énergétique. Gilles Berhault, son fondateur et directeur général, explique : « L’exclusion énergétique est un terme que nous avons inventé pour désigner les personnes en précarité énergétique rencontrant aussi de grandes difficultés dans leur vie personnelle. En France, il concerne 500 000 familles qui vivent avec moins de 10 € par jour et par personne. »
Le dispositif a été officiellement lancé fin 2023 par – feu – le ministère de la Transition énergétique. Il est financé à hauteur de 15 millions d’euros sur quatre ans par les certificats d’économies d’énergie. Un appel à projets a permis de sélectionner quatorze territoires démonstrateurs pour mettre en œuvre la démarche. « Nous sommes en train de former ce que l’on appelle des ensembliers solidaires. Ce sont des personnes qui vont suivre au quotidien les familles. Pour la plupart, elles travaillent déjà dans des collectivités ou structures d’accompagnement type Soliha. Elles doivent avoir un minimum de compétences dans le domaine social, puisqu’il va falloir tisser des relations de confiance avec les ménages, mais aussi des savoirs techniques, pour budgétiser les travaux, chercher les artisans, trouver les financements », poursuit Gilles Berhault.
Trois cent soixante ensembliers solidaires sont formés dans le cadre de cette première expérimentation, puis Gilles Berhault estime que, si l’expérimentation est fructueuse, il faudra en former mille par an.
L’expérience de Noisy-le-Grand
À Noisy-le-Grand, en Seine-Saint-Denis, Florence Presson est ensemblière territoriale et coordinatrice du programme sur le territoire Grand Paris Grand Est. Territoire qui a répondu à l’appel à projets avec l’ambition d’accompagner quatre à huit ménages dans chaque commune et sur trois quartiers de la ville de Noisy-le-Grand. « Nous avons au préalable échangé longuement avec la maire pour les définir. Ce sont des quartiers avec en majorité des maisons d’avant 1975 avec peu ou pas d’isolation, dans lesquelles les habitants reçoivent des factures d’énergie très élevées et où il risque d’y avoir une détérioration rapide sans rénovation énergétique », précise Florence Presson.
Concrètement, une cinquantaine de ménages – identifiés depuis le début de l’année grâce au travail mené avec diverses structures du secteur social notamment – sont d’ores et déjà inscrits dans le parcours. « Ils sont mis ou vont être mis en relation avec les ensembliers solidaires pour un premier rendez-vous où leur éligibilité sera vérifiée [catégories modestes/très modestes de l’Anah, ndlr]. À partir de là, l’ensemblier sera leur interlocuteur jusqu’à la fin du parcours », détaille Florence Presson. Parcours qui se construit ainsi : visites régulières, audit énergétique, remise et explication de celui-ci, montage financier, venue des artisans et devis, puis début des travaux et accompagnement à l’usage de la maison (nouveau chauffage…) une fois les travaux terminés.
Éviter le découragement
« L’idée, c’est vraiment que les ménages ne se découragent pas et aillent jusqu’au bout de la démarche. On sait que beaucoup abandonnent avant la fin, car les restes à charge sont trop importants », poursuit l’ensemblière. C’est pour cette raison que ce programme s’appuie sur un accompagnement spécifique avec une aide financière plus large : jusqu’à 6 500 € sur la partie hors travaux (accompagnement, audit) quand Mon Accompagnateur Rénov’ subventionne jusqu’à 2 000 €. Sur les travaux en tant que tels, les ménages bénéficient des aides MaPrimeRénov (ainsi que des CEE), à quoi s’ajoute pour les plus fragiles un financement supplémentaire, jusqu’à 10 000 €, rendu possible par le fonds de solidarité créé par Stop exclusion énergétique. « Ces expérimentations territoriales vont nous permettre d’évaluer le bon niveau de territoire [commune ou quartier, ndlr] sur lequel déployer ensuite plus largement le programme », conclut Gilles Berhault.