Retour d'expérience
Agrivoltaïsme : partager les résultats des suivis écologiques
Pour muscler les dossiers et donner plus de chances de développement aux projets agrivoltaïques, les chercheurs et certains développeurs prônent l’échange d’informations techniques et écologiques entre entreprises et instituts de recherche.

« Le développement des projets agrivoltaïques est conditionné à une procédure administrative comprenant notamment des études environnementales des parcelles visées sur les quatre saisons de l’année », rappelle l’association France Agrivoltaïsme dans son guide Agrivoltaïsme et biodiversité paru le 30 juin 2025. Les Missions régionales d’autorités environnementales (MRAe) sont saisies lors de la phase d’instruction des projets pour émettre un avis sur la conception du projet afin de maîtriser les influences sur la biodiversité. Pour compléter et donner toutes leurs chances aux dossiers, certains développeurs mettent en place des suivis écologiques de leurs projets.
Un nécessaire partage d’informations
« La filière a besoin d’échanger les informations liées à la biodiversité, notamment entre développeurs, afin d’être crédible et pour faire émerger des systèmes vertueux », estimait Théo Gérardin, chercheur au pôle national de recherche sur l’agrivoltaïsme de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) dont l’objectif est de produire des connaissances et de les diffuser, durant les deuxièmes Rencontres de l’agrivoltaïsme le 16 juin 2025. « Lors d’une instruction de dossier, on voit les développeurs qui respectent la réglementation et ceux qui vont plus loin, et on sait qui on garde à la fin. On a parfois l’impression que des codes nucléaires sont cachés au milieu des rendements fourragers ! Il faut vraiment que les développeurs échangent leurs données. En partageant les informations, on prend juste le risque d’aller vers plus de projets agrivoltaïques résilients. »
Depuis deux ans, l’Inrae travaille notamment sur l’impact écologique d’un site agrivoltaïque sur prairies. Avant, un seul type de prairie était observé. Après l’installation du projet, on note une prairie héliophile – c’est-à-dire qui a besoin de la lumière pour se développer – en interrang, et une autre dont l’écosystème s’est adapté à l’ombrage des panneaux. Ce constat est attendu, mais « dans trente ou quarante ans, lorsqu’il faudra démanteler, que va-t-il se passer ? », se demande Théo Gérardin. « Toutes ces adaptations vont se retrouver exposées au soleil avec davantage de chaleur et de sécheresse : seront-elles réversibles ? Pour répondre à ces questions, la filière a besoin que les développeurs échangent leurs résultats de recherche », a-t-il martelé.
Installations respectueuses du vivant
En réponse à ce vœu, Jérémy Roche, chargé d’études écologiques chez Sun’Agri, a présenté les résultats d’un suivi écologique mené par la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur sur une installation agrivoltaïque de 1,25 ha de cerisiers à Carpentras construite en 2023 (0,95 MW de puissance installée). Le but de la LPO est « d’obtenir des connaissances sur l’impact environnemental de ces centrales agrivoltaïques qui pourraient constituer une alternative intéressante aux vastes projets photovoltaïques développés dans les milieux naturels », a expliqué le chargé d’études.
Entre 2023 et 2025, la LPO a ainsi réalisé quatre passages par an, d’avril à juillet, pour vérifier les impacts de l’installation sur les insectes, les oiseaux, la colonisation des nichoirs, des gîtes, mais aussi ceux de la double haie plantée en 2023 le long du projet. Pour l’instant, il en ressort qu’il n’y a pas d’impact négatif sur les insectes et l’herpétofaune (amphibiens et reptiles) et que la recolonisation des abris et habitats est progressive. Concernant l’avifaune locale, 55 espèces ont été recensées. « Le parc n’a entraîné aucun changement significatif malgré une légère baisse des effectifs globaux, souligne Jérémy Roche. L’agrivoltaïsme est un outil pour une transition énergétique respectueuse du vivant, si les installations s’étendent à l’échelle d’une parcelle agricole, donc sur des terres à moindre enjeu écologique, l’activité humaine ayant déjà partiellement anthropisée la zone. »


