Retour d'expérience
Méthanisation agricole : passer de la cogénération à l’injection
Methagora propose aux agriculteurs de valoriser le biogaz issu de leurs unités de méthanisation en convertissant les modèles de cogénération en injection et ce, quelle que soit la proximité des sites avec le réseau de gaz. Regroupant cinq unités, le tout premier hub d’injection a été créé l’an dernier, avec à la clé d’importants bénéfices pour les exploitants.

Basé à Villeurbanne et faisant partie du groupe Seya, un développeur d’installations de biogaz, Methagora propose une solution visant à donner un nouveau souffle aux unités de cogénération agricoles – produisant électricité et chaleur grâce au biogaz –, mais aussi à augmenter les capacités nationales de production de biométhane. « Beaucoup d’unités sont éloignées du réseau de gaz pour être au plus près des intrants (effluents élevage et biomasse agricole) et il est très difficile de les raccorder directement. Or, la filière ne peut pas se contenter des installations situées à proximité du réseau pour injecter du biométhane. Notre idée consiste à convertir ces installations vers l’injection et à les connecter au réseau via le transport de leur production », indique Florent Thouminot, directeur général de Methagora.
Nouveaux débouchés, nouveaux équipements
L’entreprise prend en charge les modifications techniques des unités de cogénération (installation d’épurateurs, de compresseurs, etc.), ainsi que la recherche de débouchés pour le biométhane via des mécanismes tels que les contrats d’approvisionnement (BPA, biomethane purchase agreement, ou CPB, certificats de production biogaz). Il faut compter environ un an d’ingénierie et un mois de travaux par site, sans que cela impacte la production initiale, les nouveaux équipements se greffant autour des unités de méthanisation.
Pour Methagora, le concept consiste ensuite à raccorder au réseau de gaz les unités agricoles qui en sont le plus proches et à les associer à des unités satellites afin de créer des hubs d’injection. « Le biogaz provenant des unités satellites, situées à plus de 10 km d’un point d’injection, est compressé, puis acheminé par camion vers les hubs. Cela permet d’agréger des volumes de biométhane et d’augmenter les capacités d’injection sur un même point », explique Florent Thouminot.
De leur côté, les agriculteurs restent propriétaires des unités de méthanisation. Ils vendent simplement leur biogaz à l’entreprise. Pour le moment, un hub d’injection est opérationnel en Ardèche. Centralisant cinq unités agricoles (en Ardèche, en Isère, dans la Drôme et en Haute-Savoie), il injecte depuis octobre 2024 350 m³ de biométhane par heure.
Un modèle plus avantageux
D’après l’entreprise, les agriculteurs montrent un réel intérêt pour la transformation de leurs unités de cogénération. 35 exploitations ont d’ailleurs signé un engagement pour passer à l’injection. Cette dernière leur redonne en effet de la visibilité et de la stabilité, avec un prix d’achat fixé sur quinze ans dans le cadre d’un contrat. En matière de production et donc de revenus, l’injection est, dans tous les cas, bien plus intéressante. « Le gaz étant uniquement nettoyé et compressé, le rendement atteint 90-95 %, contre 60 % en cogénération. De plus, les agriculteurs peuvent augmenter par la suite la capacité de leurs unités de méthanisation d’environ 10-20 % (en ajoutant des blocs membranaires et en faisant évoluer les compresseurs), ce qui n’est pas possible techniquement en cogénération », affirme Florent Thouminot.
Le site central du premier hub d’injection a ainsi doublé son chiffre d’affaires depuis sa mise en service. À noter : si la majorité des unités est passée à l’injection intégrale, deux d’entre elles ont tout de même décidé de conserver leur moteur de cogénération et de consacrer une partie de leur production de biogaz aux besoins de chaleur des exploitations agricoles.
Autre avantage de l’injection : la flexibilité. « Les agriculteurs ne sont plus contraints par les objectifs de production mensuels liés aux obligations d’achat. Dans le cadre des contrats d’injection, les volumes sont annualisés. Les unités peuvent donc produire moins sur un mois et davantage le mois suivant pour compenser, sans pénalité », précise Florent Thouminot. Par ailleurs, les unités en injection nécessitent moins de maintenance et leur entretien est beaucoup moins lourd. Enfin, concernant la récupération du digestat, le passage à l’injection n’entraîne aucun changement.