La filière méthanisation connaît une croissance fulgurante en France : plus de 1 450 unités sont en service et deux à trois nouvelles s’installent chaque semaine. Mais cet essor alimente aussi les inquiétudes des riverains, notamment sur les odeurs et la qualité de l’air. Pour la première fois, une étude a évalué l’impact de la méthanisation sur les nuisances olfactives et les polluants atmosphériques.
Le réseau Atmo France, chargé de la surveillance de la qualité de l’air, a lancé en 2021 le projet Aqametha. « Nous sommes partis des sollicitations répétées de citoyens via la plateforme Signal’Air, explique Charlotte Lepitre, responsable du projet. Les riverains nous alertaient sur des nuisances, mais il était impossible de distinguer des odeurs venant de la méthanisation ou des activités agricoles classiques. Et dans la littérature, il existe peu, voire pas de données sur l’impact atmosphérique d’unité de méthanisation. » Face à cette absence de données, Atmo France, six associations régionales de surveillance de la qualité de l’air (AASQA) et le bureau d’études Osmanthe ont donc lancé ce projet Aqametha, associé au programme de recherche Aqacia (Amélioration de la qualité de l’air : comprendre, innover, agir) financé par l’Ademe.
L’intensité odorante baisse à partir de 230 mètres
Les chercheurs ont suivi douze unités représentatives du parc français, dans six régions, pendant deux périodes de deux semaines. Ils ont ciblé deux caractéristiques : les nuisances olfactives et la présence de polluants ayant un impact sur l’environnement et la santé, l’ammoniac et l’hydrogène sulfuré. Si les odeurs baissent progressivement à mesure que l’on s’éloigne du méthaniseur, l’étude révèle qu’à 230 mètres, l’intensité des odeurs diminue fortement.
« Nous ne disons pas qu’à plus de 230 mètres, il n’y a plus d’odeur, précise Charlotte Lepitre. Mais il y a une baisse importante de l’intensité odorante. Et ces nuisances peuvent aussi être liées à l’activité agricole, au stockage des intrants, notamment des effluents d’élevage, ou à l’épandage des digestats, donc hors méthanisation. » Concernant l’ammoniac et l’hydrogène sulfuré, les valeurs décelées en limite d’exploitation comme à proximité des premières habitations sont bien en deçà des seuils de recommandation de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses).
Nouveau projet sur les digestats et les bonnes pratiques
Côté méthodologie, des « nez », comme pour l’industrie du parfum, ont été formés pour distinguer les nuances des odeurs à caractéristiques industrielles. « Nous avons travaillé avec la société Osmante pour créer une formation liée à la méthanisation, explique Charlotte Lepitre. Cela permet aussi de former des salariés d’entreprises aux risques de fuites et d’incidents, sur des unités industrielles. »
Pour diffuser ses résultats, Aqametha a mis en ligne des infographies interactives accessibles aux exploitants, élus et citoyens. Objectif : dépasser les impressions pour s’appuyer sur la donnée. Le projet va désormais se poursuivre pour identifier les effets des digestats, qui, selon les méthodes d’épandage et d’enfouissement, peuvent être très odorants et émissifs. La nouvelle étude permettra aussi d’élaborer un guide de bonnes pratiques pour limiter les effets négatifs de la méthanisation sur l’atmosphère. Lancé en 2026, ce nouveau projet durera trois ans.
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