Entretien
Photovoltaïque : un guide pour les élus ruraux
Cyril Mangenot, élu de Lombers, en Occitanie, a profité de son expérience, acquise dans le cadre d’un projet photovoltaïque communal, pour réaliser un guide d’accompagnement destiné aux élus locaux avec l’appui de la communauté de communes Centre Tarn, engagée depuis 2019 dans un plan climat-air-énergie territorial. Ce document donne des clés pratiques aux élus pour qu’ils puissent mener à bien leurs projets. Explications.

Comment est née l’idée de ce guide ?
- Cyril Mangenot : En 2023, la mairie de Lombers a décidé de développer le photovoltaïque en toiture. J’en ai eu la charge, mais, partant de zéro, j’ai rencontré beaucoup de difficultés. Après la mise en service de l’installation, je me suis dit qu’il serait intéressant de partager mon expérience pour que les autres élus ne reproduisent pas les mêmes erreurs. Le guide décrit les différentes étapes du développement d’un projet, telles qu’il faut les mener, en précisant les questions que les élus doivent se poser et où ils peuvent trouver les réponses.
Quel principal conseil donnez-vous aux élus qui souhaitent se lancer ?
- C. M. : Les élus ne doivent pas se tourner immédiatement vers des installateurs photovoltaïques. Ils peuvent réaliser beaucoup d’étapes par eux-mêmes pour essayer de comprendre la situation et voir ce qu’il est possible de faire dans leur commune. Si ce travail n’est pas réalisé en amont, ils risquent d’être orientés vers des solutions qui ne sont pas forcément les plus adaptées, par exemple en termes de dimensionnement et de modèle économique : vente totale, autoconsommation individuelle ou autoconsommation collective.
Comment ce travail se traduit-il concrètement ?
- C. M. : Il est primordial de connaître les bâtiments publics à disposition. Le choix des toitures est très important. Il faut notamment mettre de côté celles qui sont mal orientées, qui contiennent de l’amiante, etc. Dans le cadre d’un projet d’autoconsommation collective, les élus doivent également connaître les besoins énergétiques de chacun des bâtiments de la commune. L’idéal consiste ensuite à aller à la rencontre des habitants et des entreprises qui pourraient produire ou consommer une partie de l’énergie. Cela demande la mise en place de réunions d’information. À Lombers, le projet ne porte actuellement que sur le patrimoine de la commune, car l’autoconsommation collective avec différents partenaires nécessite la création d’une personne morale organisatrice et elle est plus complexe à mettre en œuvre. Néanmoins, il est tout à fait possible de faire évoluer une installation comme la nôtre pour l’ouvrir aux citoyens et aux professionnels locaux.
Quels types de difficultés techniques avez-vous rencontrés ?
- C. M. : Dans l’esprit de beaucoup de personnes, en particulier des maires, c’est l’installateur qui vérifie si une charpente est capable de supporter les poids des panneaux solaires. C’est totalement faux. L’installateur demande au contraire un document prouvant que les analyses ont été réalisées. Pour les établissements recevant du public, cette démarche est obligatoire. Je m’en suis rendu compte après avoir discuté avec plusieurs entreprises. Cette anecdote m’a coûté plusieurs mois, beaucoup de discussions et de persuasion, avant que la mairie soit finalement contrainte à mener ces analyses, mais cela peut être fait très tôt dans le projet, dès que les toitures potentielles sont identifiées.
Existe-t-il des outils pour aider les élus ruraux dans leur projet ?
- C. M. : Absolument. Je donne l’exemple des simulateurs de production photovoltaïque et du portail Enedis qui permet de connaître les consommations à la demi-heure près ou encore le réseau de distribution d’énergie de la commune, mais également de suivre la production journalière de l’installation et d’en tirer des rapports. Enedis m’a d’ailleurs demandé de participer avec la communauté de communes à un webinaire en juin dernier dans le cadre du réseau Cler. J’ai pu expliquer comment j’avais utilisé ces outils pendant la phase de conception du projet, puis pour suivre la production de l’installation.
Pourquoi préconisez-vous l’autoconsommation collective ?
- C. M. : Il s’agit d’un modèle vraiment magique. Un village peut choisir des bâtiments à fort potentiel solaire pour l’installation des panneaux et en faire bénéficier des bâtiments énergivores qui ne disposent pas des toitures adaptées au photovoltaïque. La commune devient ainsi son propre producteur d’électricité et les habitants peuvent participer pour maximiser l’autoconsommation. L’autre avantage, c’est le retour sur investissement qui peut intervenir au bout de sept ans grâce à la vente du surplus à EDF OA. Avec l’autoconsommation collective, si le prix de vente du fournisseur est plus cher que le tarif d’achat du surplus de l’électricité produite, on cherche à autoconsommer au maximum. À l’inverse, on peut, au cours du temps, choisir de minimiser son autoconsommation pour vendre davantage d’électricité produite, via la modification des clés de répartition qui définissent la quantité de production allouée aux différents bâtiments. À Lombers, l’opération permet de couvrir presque la moitié de la consommation des bâtiments communaux, ce qui réduit très fortement la facture énergétique.
Suivez le guide !
Disponible ici, le guide détaille les avantages d’une installation photovoltaïque et les différentes étapes d’un projet : connaître les réglementations locales, estimer la production des panneaux et la durée du projet, choisir un modèle de valorisation économique, etc. Il fait également un focus sur l’autoconsommation collective et donne aux élus des conseils pratiques : s’entourer de personnes compétentes, aborder certains points lors de la consultation des installateurs, etc.