Retour d'expérience

Récupérer la chaleur des litières animales

Une partie des cheptels est logée sur une litière de paille. Cette couche dégage de la chaleur dite « fatale » qui peut être récupérée notamment pour fournir l’eau chaude sanitaire et alimenter un réseau de chauffage.

PAR ALEXIS DUFUMIER - AVRIL 2022
Au sein d’une aire paillée, la litière s’accumule chaque jour par le dessus et forme une couche de plus en plus épaisse. Celle-ci s’échauffe en profondeur jusqu’à 40°C environ du fait de l’activité bactérienne. ©Alexis Dufumier

Quand on parle de chaleur fatale, on pense souvent aux grosses installations industrielles. Pourtant, d’autres activités en sont productrices, à commencer par l’agriculture. La litière des animaux dégage notamment d’importantes quantités de chaleur lorsqu’elle est placée en condition de fermentation avec démarrage d’un processus de compostage. Cette chaleur «.gratuite.» est encore aujourd’hui très peu valorisée. Pourtant, des systèmes de récupération ont semble-t-il fait leur preuve et seraient faciles à mettre en place. Le récupérateur peut prendre place au sein d’un composteur de fumier à la ferme par exemple. Mais il peut aussi récupérer directement la chaleur sous la litière des animaux en bâtiments. Cette deuxième option représente potentiellement un levier d’économies d’énergie importantes sur les territoires car elle peut s’adapter aux installations déjà existantes, sans nécessiter de créer des unités de compostage.

Des serpentins enterrés

Au sein d’une aire paillée, la litière s’accumule chaque jour par le dessus et forme une couche de plus en plus épaisse. Celle-ci s’échauffe en profondeur jusqu’à 40°C environ du fait de l’activité bactérienne. À la ferme expérimentale de la Blanche Maison (élevage de vaches laitières), dans la Manche, un système a été testé pour récupérer cette chaleur afin d’assurer les besoins en eau chaude sanitaire de l’élevage et le chauffage de 15 m² de locaux. Le dispositif de récupération a été constitué de tuyaux enterrés à 15-20 cm en dessous du niveau de curage pour éviter d’abîmer les tuyaux lors du vidage de l’aire. Une surface d’échange des tuyaux de 100 m² a été mise en place qui serpente sur environ 200 m² de l’aire paillée. L’installation couplée à une pompe à chaleur de 6 kWh fournit 10 MWh d’énergie sur l’année. L’eau préchauffée par la litière est pompée et stockée dans un ballon de stockage de 700 litres. Elle alimente un chauffage avec radiateurs à basse température. Par ailleurs, cette eau est reprise par la pompe à chaleur pour alimenter un ballon d’eau chaude à 60°C. Cette eau chaude sanitaire assure les besoins au nettoyage de la salle de traite, du tank à lait et alimente le lavabo de la laiterie. « La pompe à chaleur doit être placée à proximité du poste de consommation d’eau chaude. Par ailleurs, la puissance de la pompe à chaleur doit être bien adaptée aux besoins en énergie », souligne la ferme expérimentale. Un autre projet fonctionnant sur le même principe a été mis en place à Maisoncelle dans le Pas-de-Calais, sur la ferme de vaches laitières de l’EARL Périn Étienne. L’installation, couplée à une pompe à chaleur de 16 kWh, fournit 37 MWh de chaleur sur l’année. Cette chaleur assure les besoins de l’élevage et le chauffage de 200 m² de locaux dont la maison d’habitation de l’agriculteur.

Besoins électriques divisés par trois

Ces deux expériences ont montré la capacité de ces systèmes à économiser de l’énergie. L’installation est simple à mettre en place. Le gain sur la facture d’énergie est estimé à 1 000 € par an dans le système de la ferme de la Blanche Maison avec une consommation électrique trois fois inférieure à ce qu’elle aurait été avec un équipement classique (ballon et radiateurs 10 % électriques). Cependant, le coût de la pompe à chaleur est très élevé (25 500 € HT pour la Blanche Maison et 38 500 € TTC pour Maisoncelle). Le retour sur investissement est estimé à 20 ans pour Blanche Maison (hors aides). L’installation de Maisoncelle permet d’économiser environ 2 000 € par an de consommation d’énergie. Le retour sur investissement y est estimé à 15 ans sans aides, et à 9 ans en incluant les soutiens qui ont été obtenus.  Ces projets mis en place de façon artisanale au début des années 2010 ont montré leur efficacité, mais aussi leurs limites. Depuis, il ne semble pas que d’autres initiatives aient émergé pour les déployer à plus grande échelle. Cependant, le contexte actuel d’inflation sur les prix de l’énergie pourrait pousser à réinventer de telles solutions. Des synergies sont sans doute possibles sur ces sujets avec d’autres technologies éprouvées. Des savoir-faire de pointe ont notamment été acquis ces dernières années pour récupérer la chaleur des installations frigorifiques industrielles. Pourquoi ne pas les remanier pour les adapter aux élevages ?

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