Le tour de la question
S’adapter au dérèglement climatique : un guide pour les filières agroalimentaires
Canicules, sécheresses, grêle, inondations, vents violents, hivers trop doux, etc. Alors que les événements météorologiques reflétant le dérèglement climatique en cours se manifestent désormais en chaque saison, toutes les filières de l’agriculture en mesurent les premiers impacts. Si l’important secteur du vin s’en préoccupe déjà depuis plusieurs années et si des actions sont entreprises pour pallier le manque d’eau pour certaines cultures de céréales, il n’existait pas encore de réflexion généralisée dans le monde de l’agriculture.
C’est un outil pionnier que vient de publier l’Ademe. “Comment développer sa stratégie d’adaptation au changement climatique à l’échelle d’une filière agroalimentaire ?” est un guide pratique visant à donner les moyens à ces dernières d’anticiper les changements contraints et de maintenir leur compétitivité. Trois filières professionnelles — “pommes” à Angers (49), “maïs” à Labège (31) et “viande bovine” à Mâcon (71) —, se sont prêtées en mars dernier à un exercice complet d’ateliers, destiné à construire une méthodologie générique à l’échelle d’une filière : préparation de la réflexion collective, cartographie de la filière et de ses acteurs, identification des impacts climatiques (de la production au marché), opportunités à exploiter, élaboration d’une stratégie d’adaptation, facilitation des actions à mettre en place.
L’un des principaux enseignements de cette étude tient à l’échelle collective qu’elle invite à prendre en compte. Elle distingue ainsi l’intérêt de considérer les interactions entre les maillons de la chaîne, de l’amont à l’aval, pour garantir l’efficacité d’une démarche d’adaptation : s’il apparaît évident que l’étape de la production est concernée, c’est aussi le cas pour l’approvisionnement en matières premières (type, origine, etc.), la transformation (modification des processus), le stockage (consommation d’énergie) ou le transport, mais aussi le marché (préférences de consommation, saisonnalité, etc.).
Cependant, la mobilisation de l’ensemble acteurs ne s’est pas révélée « évidente », souligne l’étude, « même si de nombreux acteurs ont montré leur intérêt pour la problématique abordée ». Ce point fait l’objet d’une recommandation particulière : « Il est primordial de prévoir en amont de la démarche une étape de sensibilisation à destination des acteurs et des décideurs clés de la filière. »
Un autre point mérite l’attention : la prise en compte du temps long dans la réflexion et l’action. Quelle priorité donner à des interventions guidées par l’état du climat à l’horizon 2030 ou 2050 face à des préoccupations de plus court terme ?
En découlent des arbitrages d’un type nouveau : à quel moment et comment opérer des choix stratégiques à fortes répercussions sur la filière, dans l’optique de bénéfices de moyen ou long terme, plutôt que d’en rester à des actions plus tactiques, à effet de court terme mais renforçant peu la résilience du système ? « Une démarche qui peut nécessiter l’appui d’un regard extérieur pour accompagner la prise de recul », suggère le guide.
