Retour d'expérience
Se lancer dans le déconditionnement de biodéchets
Christophe Rousseau, agriculteur et dirigeant d’Avallon Bio Énergie dans l’Yonne, alimente son méthaniseur avec des matières agricoles et des biodéchets débarrassés des matières plastiques grâce à son usine de déconditionnement.
Christophe Rousseau, agriculteur dans l’Yonne, et un de ses voisins ont lancé leur première unité de méthanisation en cogénération en 2014 pour valoriser leurs effluents d’élevage. Afin d’améliorer le pouvoir méthanogène de leurs intrants, ils ont commencé à valoriser les biodéchets de grands groupes industriels en 2018. « Mais nous avons rencontré de gros problèmes de qualité des soupes avec beaucoup de petits bouts de plastiques, raconte Christophe Rousseau lors d’un webinaire organisé par GRDF le 17 octobre 2024. Le but étant d’épandre le digestat sur les parcelles de nos exploitations, nous ne voulions pas de plastiques. Nous avons donc demandé rapidement aux grands groupes industriels que la qualité des biodéchets s’améliore, mais nous avons constaté peu de réactions de leur part. »
Comprenant que la solution ne viendrait pas des industriels, Christophe Rousseau et son associé décident alors de se lancer eux-mêmes dans le déconditionnement de biodéchets. « Nous souhaitions redonner au sol un digestat de qualité sans inertes et créer un projet qui ait du sens, au service de notre territoire, souligne-t-il. Pour ce faire, nous avons travaillé avec Green Creative, une entreprise industrielle basée dans le Val-de-Marne, qui conçoit et fabrique des équipements pour valoriser les déchets. »
50 % de biodéchets
La nouvelle unité de Christophe Rousseau, Avallon Bio Énergie, qui a vu le jour à Étaule (Yonne) en 2023, se compose d’une unité de méthanisation et d’une usine de traitement des biodéchets au toit recouvert de panneaux photovoltaïques (240 kWc) en autoconsommation. Elle injecte 200 Nm³/h/an de biométhane dans le réseau de la ville d’Avallon et se nourrit à 50 % de biodéchets et à 50 % de matières agricoles.
« Tous les jours, des grandes surfaces et des industriels, essentiellement, dans un rayon de 100 km maximum, nous livrent des camions de fruits, légumes, pains, pâtisseries et produits laitiers. Le premier tri permet de mettre 99,5 % des plastiques de côté. Le système Flexipure créé par Green Creative traite ensuite les micro-plastiques contenus dans la soupe. La norme est de 5 g d’inertes par kilogramme de matière sèche de digestat. Aujourd’hui, nos analyses montrent que nous sommes entre 0 et 1 g. Le but est de tendre vers 0 pour un retour au sol d’un digestat de qualité », explique Christophe Rousseau, qui traite environ 12 000 tonnes de biodéchets par an.
Alimenter le méthaniseur gratuitement
L’agriculteur rappelle également que son objectif initial est « d’alimenter le méthaniseur pour zéro euro ». « Les grandes surfaces ou les industriels nous payent 60 €/t pour traiter leurs biodéchets. En gros, 40 €/t nous servent à amortir les machines et à payer le personnel, et 20 €/t financent l’enfouissement ou l’incinération du plastique mis de côté, compte Christophe Rousseau qui cherche à réduire ces frais de traitement du plastique. Nous testons actuellement le lavage des plastiques pour d’une part récupérer les matières organiques encore collées dessus et d’autre part pour, nous l’espérons, valoriser ces derniers en combustibles solides de récupération pour alimenter des cimenteries. »