Retour d'expérience

Un méthaniseur pour maintenir des exploitations agricoles en vie

À Auros, dans le sud de la Gironde, une unité de méthanisation appartient en majorité à neuf agriculteurs. Ancré dans le territoire, le projet a pu voir voir le jour grâce à la participation d’acteurs publics et privés. Plus de 1 100 citoyens ont notamment participé au financement.

PAR ARNAUD WYART - MARS 2024
Unité de méthanisation d’Auros en Gironde. ©AgriEnergie

Dans le Pays Haut Entre-deux-Mers, l’idée d’un méthaniseur est née en 2015, lorsque le Siphem (le syndicat mixte interterritorial) a fait réaliser, par Solagro, une étude sur le potentiel méthanogène du territoire. Celle-ci évoquait la possibilité d’installer cinq ou six unités. De leur côté, les exploitations agricoles locales, petites et familiales (50 à 60 hectares en moyenne), rencontraient des difficultés financières et risquaient de disparaître.

Naissance d’une solution

« Les agriculteurs devaient notamment faire face à une problématique au niveau du stockage des effluents d’élevage. La réglementation impose l’installation de fumières, mais ces bâtiments sont trop chers », explique Yannick Duffau, maire de Brannens et vice-président du Siphem depuis 2020. « En outre, le lien entre les agriculteurs se perdait, alors que ceux-ci travaillaient ensemble auparavant. Ces questions me turlupinaient depuis plusieurs années. Je n’y connaissais rien en méthanisation, mais j’ai décidé de me lancer pour leur apporter une nouvelle source de revenus. » Un porteur de projet était toutefois nécessaire. Yannick Duffau a donc réuni quatorze agriculteurs, dans un rayon de 10 km autour de Brannens. Après s’être fait présenter la méthanisation par le Siphem, le collectif a d’abord créé une association en 2017. « Ce type de structure était moins risqué pour porter la préfiguration du projet et il permettait d’aller chercher des subventions. »

Une étude de faisabilité a ensuite été réalisée par Solagro, financée à 80 % par une communauté de communes, l’Ademe et le département de la Gironde. Yannick Duffau souhaitait une implantation sur sa commune, mais l’idée a été abandonnée en raison d’une opposition au sein du conseil municipal. « Nous avons pourtant associé dès le départ les services de l’État et les associations environnementales, dans le but de bâtir un projet ensemble et de favoriser son acceptabilité. Un an plus tard, nous avons finalement trouvé un autre terrain sur la commune d’Auros, à 5 km du site initial et cette fois, tout s’est bien passé. »

Un projet fédérateur

Une fois le site d’implantation validé et la population sensibilisée, la société à actions simplifiée (SAS) AgriÉnergie a été fondée en avril 2019 pour monter le projet, avec un capital de 11 000 €. « Il ne restait que neuf exploitants. Ces derniers ont investi au total 9 000 €. La commune d’Auros et l’Association de développement agricole et rural de Mazères (Adar) ont quant à eux investi 1 000 € chacun. Le capital a ensuite été augmenté à hauteur de 40 000 € », indique Yannick Duffau.

D’autres acteurs locaux, publics et privés, ont en effet rejoint la société de projet. Outre les neuf agriculteurs (qui détiennent aujourd’hui 74% des parts), l’Adar Sud Gironde (12,5 %) et la commune d’Auros (2,5 %), AgriÉnergie compte parmi ses actionnaires la communauté de communes du Réolais en Sud Gironde et celle du Bazadais (2 % des parts chacune), le département de la Gironde (2 %), ainsi que trois entreprises (1 % des parts chacune).

Par ailleurs, des citoyens ont participé au financement du projet, même s’ils ne sont pas rentrés dans le capital de la SAS. « Il était important pour nous de monter le projet avec tous les acteurs du territoire. Grâce à la plateforme MiiMosa, nous avons levé 500 000 €. Plus de 1 100 personnes ont participé », se réjouit Yannick Duffau. Le budget s’est élevé à 6,5 millions d’euros. Il a été subventionné à hauteur de 1,25 million d’euros par l’Ademe et la région Nouvelle-Aquitaine. La SAS a emprunté 4,7 millions d’euros auprès du Crédit Mutuel Sud-Ouest et le reste a été apporté en fonds propres. « Le capital de la société est limité par rapport à l’investissement nécessaire. Sans la participation des autres acteurs, la banque ne nous aurait pas suivis », assure Yannick Duffau.

Des retombées locales

Les travaux, réalisés par des entreprises locales, ont duré 15 mois. En service depuis octobre 2022, l’installation comporte deux digesteurs de 2 080 m3, ainsi qu’une unité de stockage de 5 200 m3 pour le digestat liquide. Elle traite près de 15 000 tonnes d’intrants par an (les cives des agriculteurs actionnaires, récoltées et achetées par la SAS, ainsi que des effluents provenant d’élevages bovins, de centres équestres, etc.). « Nous valorisons également le lisier d’un éleveur qui ne pouvait pas l’épandre, car les riverains se plaignaient », ajoute Yannick Duffau.

Désormais, l’installation produit 100 Nm3/h de gaz par an et l’injecte dans le réseau du gestionnaire de transport de gaz Teréga. Les actionnaires perçoivent les dividendes de la SAS et les agriculteurs récupèrent également le digestat. Le retour sur investissement, lui, interviendra dans sept ans, mais grâce au projet, les neuf exploitations ont été sauvegardées. En outre, la SAS a créé deux emplois locaux. Elle recrute régulièrement des saisonniers et travaille avec des professionnels du territoire.

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