Entretien

Analyse de cycle de vie du biométhane : premiers résultats

Sylvaine Berger, directrice adjointe de l’association Solagro, revient sur une note d’information sur l’analyse de cycle de vie du biométhane, qu’elle a publiée en juin dernier avec l’association négaWatt.

PAR CHRISTEL LECA - NOVEMBRE 2021
Sylvaine Berger, directrice adjointe de l’association Solagro. ©Solagro

Le biométhane est-il vertueux, d’un point de vue environnemental et énergétique, au regard de son cycle de vie ?

Oui. Les analyses de cycle de vie (ACV) montrent que son impact est positif en termes d’émissions de GES, par rapport à son homologue fossile, mais cela va bien au-delà. D’abord parce que le gaz produit, issu de la biomasse, est considéré comme étant d’origine renouvelable : le CO2 qu’il dégage en étant brûlé provient du carbone qui a été fixé par la photosynthèse dans l’année. C’est la neutralité carbone. Le CO2 contenu dans le biogaz, quant à lui, provient de matières biodégradables qui se seraient décomposées – en un mois environ – par une autre voie si elles n’avaient pas été méthanisées. Mais on constate également que les exploitations agricoles concernées consomment moins d’engrais azotés. Avec le programme CASDAR Méthalaé, nous avons observé l’impact de la méthanisation sur l’évolution des pratiques agricoles dans 46 exploitations françaises. Ces exploitants ont réduit en moyenne de 20 % leur consommation d’engrais chimiques, jusqu’à s’en affranchir complètement pour certains. Ils épandent en effet le digestat de méthanisation dont le carbone stable n’a pas été détruit : celui qui est le plus intéressant pour les sols. Certains agriculteurs ont constaté aussi qu’il y avait moins de mouches, moins de mammites [une inflammation de la mamelle chez les mammifères, traitée aux antibiotiques et générant des pertes d’exploitation importantes, ndlr] et moins de mortalité dans les élevages, sans doute parce que l’on cure plus souvent les bâtiments d’élevage pour avoir des fumiers plus frais et plus méthanogènes.

Les effets sont plutôt positifs sur l’agrosystème : quels sont les points de vigilance ?

Comme pour l’épandage du lisier, il convient de respecter de bonnes conditions météorologiques (température, pression atmosphérique et vent) afin que l’amendement soit efficace. Il faut également adapter le matériel d’épandage (pour un apport au plus près du sol, voire dans le sol), mais également les périodes d’épandage, car l’apport doit se faire au plus proche des besoins de la plante. Quant au transport des matières, pour les installations de méthanisation individuelles ou collectives agricoles, il est similaire à celui engendré par l’épandage classique des effluents. Un méthaniseur intégrant des matières venant de l’extérieur, comme des biodéchets de collectivités, obtiendra plus d’éléments fertilisants, ce qui permettra de fertiliser plus de surfaces agricoles avec un fertilisant d’origine renouvelable. Le transport de ce digestat en surplus, issu du traitement de biodéchets extérieurs, ne devrait pas générer d’émissions supplémentaires, car, en situation de référence, ces biodéchets parcourent souvent une centaine de kilomètres pour être incinérés ou enfouis. Par ailleurs, sur l’unité de méthanisation, si les équipements sont bien installés et la maintenance effectuée correctement, cela réduira les rejets de GES dans l’atmosphère, sources de nuisances et de perte d’énergie. On pourra compter sur l’utilisation régulière de “renifleurs” qui permettent de vérifier l’étanchéité au niveau des points sensibles (vannes notamment). Ensuite, le stockage du digestat devrait être couvert avant épandage pour les mêmes raisons. C’est un surcoût rapidement amorti et qui facilite l’acceptation locale des projets, tout en anticipant une réglementation future vis-à-vis des eaux de pluie.

Une analyse du cycle de vie doit aussi prendre en compte l’ensemble des externalités : qu’en est-il ?

L’un des points faibles de la production de biométhane réside dans sa consommation électrique (épuration, voire compression quand injection dans le réseau de transport), qui est dans notre pays principalement nucléaire, avec les impacts que nous connaissons et d’autres, comme celui de l’eutrophisation des cours d’eau notamment liée à l’utilisation de cuivre dans les réseaux électriques. L’équilibre doit être trouvé avec cet impact au regard de la production d’une énergie renouvelable issue de déchets. Nous attendons les résultats d’une étude Inrae Transfert qui devrait sortir d’ici quelques semaines sur l’ACV du biométhane issu de ressources agricoles pour mieux répondre à cette question.

Lire la note d’information Solagro/négaWatt : La méthanisation dans le mix énergétique, juin 2021

La méthanisation en plein boom en France

Selon GRDF, au 1er septembre 2021, on comptait en France 303 sites de méthanisation raccordés au réseau gazier, représentant une production de 5 410 GWh/an, soit environ 1 % de la consommation de gaz en France. À cela s’ajoutent les unités en cogénération, qui étaient au nombre de 870 au 1er janvier dernier. Depuis 2017, la France est devenue le premier pays en Europe en nombre de nouvelles unités de biométhane.

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