Entretien

Recherches sur la méthanisation : la productivité en ligne de mire

À l’Institut polytechnique UniLaSalle, la méthanisation agricole est étudiée sous l’angle technique, agronomique et social. Entretien avec Thierry Ribeiro, enseignant-chercheur bioprocédés et méthanisation de l’institut.

PAR AUDE FABRE - AVRIL 2023
Thierry Ribeiro, enseignant-chercheur à l’Institut polytechnique UniLaSalle. ©Unilasalle

Certains de vos sujets de recherche portent sur la méthanisation en voie solide. Pourquoi ?

La méthanisation voie solide concerne toutes les matières qui vont avoir des teneurs en matière sèche assez élevées, par exemple les fumiers pailleux ou certaines biomasses végétales. En France, plus de 90 % des méthaniseurs sont en voie liquide. Cependant la voie solide peut parfois être la solution pour certains types de gisements qu’il serait dommage de mettre dans des méthaniseurs voie liquide car on serait alors obligé de beaucoup les diluer. L’objectif reste d’augmenter la productivité, c’est-à-dire le volume de méthane produit en fonction de la quantité de matière introduite.

Pour cela, nous regardons comment optimiser le process, par exemple en adaptant les mélanges, en étudiant les transferts de gaz et l’hydrodynamique (la circulation des liquides au travers des matières). Si le liquide ne circule pas, les bactéries non plus, donc la dégradation ne se fait pas et il n’y a pas de production de gaz. Par ailleurs, en méthanisation voie solide, le temps de dégradation de la matière est plus long qu’en voie liquide. On cherche ainsi à réduire ce temps de séjour, car cela permet de diminuer la taille des installations, donc les investissements.

La recherche s’intéresse également aux cultures intermédiaires à vocation énergétique (Cive)…

Les Cive ont un double rôle. Elles permettent de maintenir un couvert végétal, ce qui est maintenant une obligation sur les parcelles, et sont aussi des pièges à nitrates. Cette biomasse est ensuite utilisée comme source d’alimentation d’un méthaniseur. La recherche étudie les rendements des différents types de Cive et les productivités qu’elles génèrent au niveau de la méthanisation. Elle analyse aussi leur impact sur l’ensemble du système agricole : irrigation, fertilisation, changements de pratiques au niveau de l’exploitation agricole. Quand des agriculteurs mettent en place des Cive, qu’est-ce que cela va modifier en termes de rotation des cultures, d’usage de produits phytosanitaires, d’engrais, etc. ?

En méthanisant, ils produisent aussi du digestat qui va retourner au sol. Qu’apporte cette substitution des engrais chimiques par du digestat à l’exploitation au niveau économique, mais aussi agronomique ? En fonction des proportions de digestat, y a-t-il des modifications de rendement, des changements sur la levée des plantes ? Ces recherches agronomiques ont un lien avec le fonctionnement du méthaniseur, car il s’agit au final de regarder l’impact d’une culture x ou y sur l’augmentation de production de méthane.

Plusieurs projets portent sur la valorisation du CO2 émis par la méthanisation.

Le biogaz peut contenir jusqu’à 50 % de CO2. Quand on épure le biogaz pour injecter du biométhane dans le réseau de gaz, il reste donc du CO2 qui pour l’instant est rejeté dans l’atmosphère. Comme il a déjà été piégé dans les plantes, ce n’est pas du CO2 surnuméraire, mais du CO2 biogénique. Néanmoins, on peut le revaloriser avec de l’hydrogène obtenu par électrolyse de l’eau, pour en faire du méthane. C’est ce qu’on appelle la méthanation. C’est le principe du power-to-gas. L’objectif reste d’augmenter la production de biométhane à injecter dans le réseau de gaz naturel et à terme de substituer la totalité du gaz naturel d’origine fossile par 100 % de gaz renouvelables.

D’autres pistes sont étudiées pour valoriser le CO2 : les serristes (maraîchers et horticulteurs) l’utilisent pour favoriser la croissance des plantes. L’industrie agroalimentaire pourrait également s’en servir pour la gazéification de boissons. La culture de microalgues peut aussi être une piste alternative.

Vous évoquez aussi la métagénomique, l’étude du contenu génétique d’échantillons issus d’un environnement spécifique. En quoi est-ce important pour la méthanisation ?

Oui, certaines recherches plus fondamentales s’intéressent à ce qui se passe à l’intérieur des méthaniseurs, en effectuant la caractérisation des populations microbiennes. L’objectif est d’identifier quelles sont les populations de bactéries impliquées au cours de la méthanisation, selon que celle-ci fonctionne bien ou moins bien. L’objectif est de pouvoir ensuite stimuler telle ou telle population bactérienne en travaillant sur les types de substrats à introduire.

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